Le loup (photo prise par Peuple Loup).                               

            

   

   

 

 

Tel qu'on se l'imagine dans nos pires cauchemars.                                                                            

Actuellement les gens qui n'ont jamais connus les loups n'ont pas peur d'eux et seraient même prêts à partir en safari-photos ou les mains dans les poches en pleine forêt, tout excités à l'idée que cet animal de légende a repeuplé l'espace où nous n'étions guère que le seul gros prédateur auparavant, fantasmant plus sur Croc-Blanc ou sur une nouvelle espèce de toutou à observer, à apprivoiser et à caresser que sur le loup du Petit Chaperon Rouge, le loup des steppes, ou l'animal monstrueux qui hantaient nos terreurs nocturnes.

Et oui, les loups sont bien de retour dans la région, c'est maintenant une réalité, et ceci après que les plus vieux des villageois ne puissent guère se rappeller de cette légende de l'existence d'un ou peut-être même de deux loups résiduels d'un passé presque moyennageux, dont les parents pourtant leur avaient conseillé de se méfier, quand ils étaient tout gamins, c'est-à-dire au début du siècle passé, quand ils devaient rentrer le soir, depuis le petit chemin de leur école, l'ancienne école qui était isolée tout en haut près de la forêt. En fait tout le monde ici sait pour les loups maintenant, et ce n'est plus une vieille histoire, mais chut, on n'en parle pas trop..

L'eau chaude de la source bouillonne, le soir tombe et l'air sent la laine des moutons, les sommets commencent à troquer leur neige contre un manteau scintillant, les moutons bêlent et c'est un tintamarre de clochettes un peu avant la tombée de la nuit, les figurines jaunâtres vivantes qui décoraient en pointillé les lettres géantes des thermes posées à l'aplomb de la montagne juste en face de moi commencent à dégouliner et converger vers une sortie du parc, c'est la panique, et c'est trop lent en même temps, deux groupes sont séparés, est-ce le loup, j'essuie l'eau nourricière souffrée qui ruisselait de mon visage et j'écarquille les yeux, non, c'est juste le fermier qui vient chercher son troupeau...

Ce n'est pas encore le loup, pas cette fois.

Nos loups seraient venus depuis le fin fond de l'Italie, depuis peu, quelques années au plus, et petit à petit, et depuis ils ont tué, on a compté et on les a décompté exprès, plus de 40 moutons, veaux, chèvres assassinés sur un tout petit périmètre, cet été et cet automne même, ici, en moins de 4 mois exactement, ils ont tué, égorgeant et déchiquetant même en plein jour et même au pied des fermes ou des pistes et des remontées mécaniques de Val d'Illiez, Champéry. Ils sont venus lacérer les bêtes et les emporter vers Vouvry aussi..

Mais pour rester objectifs, il faut bien dire qu'on ne compte qu'une dizaine d'attaques de loups sur l'homme ces dernières années, dans les quelques pays européens où ils sont présents, et même si les attaques ont toutes été mortelles, l'heure n'est pas à la panique.

Quoiqu'il en soit les gens et le bétail ne sont pas loin des loups et bientôt le bétail sera rentré, il nous faudra donc affronter des loups qui seront privés de ces proies-là.

Est-ce une légende ou non qu'Ysengrin ne se priverait pas d'emporter le pâtre au milieu de son troupeau et d'attaquer l'homme même en plein jour, même avec du gibier alentour ou du bétail à profusion, par facilité en quelque sorte ?

J'ai lu en tous cas qu'il ne laissait de ses victimes, humaines ou animales que la tête, intacte, les boyaux, ainsi que les mains et les pieds, ou les pattes... Cela fait froid dans le dos.

Si le loup décidait d'attaquer, et il ne le ferait certainement qu'après nous avoir suivis ou observés et après être sûr de son coup, nous ne pourrions alors pas résister sans armes, et surtout si notre constitution est celle d'une petite femme ou d'un enfant, ses proies préférées dans le passé. La simple idée qu'il pourrait passer à l'acte n'est pas rassurante quand on marche depuis des minutes ou des heures, seul, le long des chemins isolés ou des torrents avec les buissons de la pente arborée nous surplombant de tous cotés

Alors est-ce un animal qu'on ne verra pas mais dont on parlera beaucoup ou bien une sorte de velociraptor tapi en embuscade qui décidera finalement de nous mettre au menu quand nous nous y attendrons le moins et nous laisserons aller bien légitimement à profiter des merveilleuses ballades dans la nature sauvage de la région ?

            

(photo prise par Peuple Loup)

Je pense que les amateurs de loups, et il y en a venus d'ailleurs, peuvent se réjouir et tenter de l'apercevoir par ici, ce qui a déjà été fait par des gens du coin, on aurait même vu un adulte et deux petits.

En tous cas des loups si actifs dans leur prédation, alors qu'on ne peut guère comptabiliser les prélèvements sur un gibier normalement abondant, doivent certainement avoir plus d'une bouche à nourrir, sans doute existe-t-il au moins une ou plusieurs petites meutes ?

Le territoire à leur disposition est grand, et le loup peut indifféremment passer vers la France ou vers la Suisse, c'est comme le nuage de Tchernobyl, il ne s'arrêtera pas vraiment à la frontière, sauf que les chasseurs en France ne lui laisseront pas sa chance même si l'animal est protégé ou en tous cas encore officiellement inconnu de ce coté. En Suisse aussi, sur un petit territoire, la chasse a été autorisée à cause du nombre élevé de dégâts sur les troupeaux, mais le loup bouge et sortira sans problèmes pour aller vivre et chasser ailleurs.

L'an dernier, les chasseurs de Val d'Illiez n'ont pas attendu le feu vert pour surprendre et se débarasser de ce spécimen-ci et dans la région, le loup fait l'unanimité, les gens n'ont pas trop envie de le voir vivant.

(Photo tirée du Nouvelliste)

   

Mais quand on est bien au chaud sous la couette dans nos petits hôtels de montagne, c'est amusant de se dire que les loups eux sont juste là dehors dans les forêts, au sommet de nos montagnes...

Mon hôtel préféré d'ailleurs, c'est Le Repos à Val d'Illiez, mais j'en parlerai plus tard.

C'était la fenêtre de mon studio depuis l'hôtel avec vue sur les Dents du Midi, maintenant ces petites montagnes portent encore mieux leur nom...

A propos, savez-vous à quoi ressemblent les dents d'un loup ?

Un village si singulier en Valais, dans la Suisse insoupçonnée des légendes et du coeur !

Je vais raconter ce village merveilleux où je n'ai fait que passer pour mon travail mais qui m'a donné à goûter ce que d'autres touristes ou passants plus chanceux que moi et qui s'y installent définitivement appellent le paradis sur terre !

Pays de Savoie, un seul peuple, Valais ou France, sans différence.

La frontière coupe parfois artificiellement un village en deux, mais eux ne font pas de différence.

La rencontre est immédiate, inespérée, insolite, vous ne pourrez pas éviter leur sourire, immense, naïf, comme fixé sur leurs visages, vous comprendrez sans effort leur humour, et trouverez soudain si étrange de ne pas entendre un seul ragot et n'assister à aucune engueulade, surtout en si petite compagnie.

Mais oui, rien n'est feint, ces gens sont bien honnêtes et simples, mais il vous faudra un peu de temps pour en être sûr, alors qu'eux vous auront déjà adopté avec vos défauts.

L'extrême gentillesse de gens prêts à tout pour vous rendre service, toujours prêts à inviter, à discuter ou à boire un coup tous ensemble en faisant la tournée de tous les établissements du village, aura tôt fait d'entrainer le plus antisocial d'entre vous. Bien qu'ils soient très religieux ils ne sont pas prosélytes et sont également très ouverts d'esprit, très humains, très accueillants.

Et vous pourrez vous adonner à la boisson ou à l'épanchement du coeur sans arrière-pensée, si ce n'est pas untel au rendez-vous avec vous alors ce sera un de ses cousins, d'ailleurs possible que plusieurs veulent vous inviter ou discuter avec vous en même temps, cela aussi vous étonnera, ils sont tous cousins et liés ensemble et liés aux villages d'à coté, et ils s'entendent bien !

Les problèmes administratifs se règlent plus à l'amiable et entre eux que selon les lois officielles, et donc il faudra apprendre à leur faire confiance.

De l'autre coté en Savoie, c'est la même mentalité, peut-être encore plus extraordinaire dans un pays où il est difficile de vivre et de garder des commerces par faute d'employés et qui a toujours organisé la solidarité de passage en Suisse, des juifs, des frontaliers, rappelez-vous de cette chanson de Francis Cabrel...